En début d’année 2020, Monsieur Didier Martin, député La République en Marche de la Côte d’Or, s’adressait au ministère de la Culture à l’occasion de la date anniversaire de l’inscription du repas gastronomique des Français au patrimoine immatériel de l’UNESCO. Il le questionnait sur le bilan de dix années d’actions de promotion, de valorisation et de conservation de de « la cuisine française dans un monde de gastronomes exigeant plaisir, santé et équité » en France comme à l’international. Voici la réponse de Madame la Ministre.
« L’inscription, le 16 novembre 2010, du repas gastronomique des Français au Patrimoine culturel immatériel de l’Humanité sur la Liste représentative instaurée par la Convention de l’UNESCO de 2003 pour la sauvegarde du patrimoine culturel immatériel, a eu de nombreux effets en termes de transmission et de valorisation de cet élément patrimonial. Au cours de ces dix années, la Mission française du patrimoine et des cultures alimentaires (MFPCA) a mis en œuvre les mesures découlant de l’inscription, qui, par la documentation, la promotion et la large diffusion des connaissances, mettent en valeur la vitalité du patrimoine gastronomique français.
En cette année anniversaire, dont les événements ont été brutalement interrompus par l’épidémie de Covid-19, la MFPCA s’est ainsi engagée dans la coordination de célébrations (labellisation d’activités d’intérêt national ou territorial, exposition itinérante, manifestations…), pour fêter cet art du bien manger et du bien boire. Lancée le 19 juin 2013, sous l’égide des ministères chargés de la culture et de l’agriculture, la création de quatre Cités de la Gastronomie est la conséquence la plus visible de cette reconnaissance. Ces quatre équipements culturels innovants, reposant sur différents types de gouvernance et de modèles économiques, sont dédiés à la valorisation du repas gastronomique et chacun élabore et anime un « pôle moteur » dans des domaines spécifiques :
- Tours, dans le domaine des sciences humaines et sociales (Institut européen d’histoire et des cultures de l’alimentation-IEHCA), a inauguré en 2017 une première tranche de son projet : la Villa Rabelais, centre culturel dédié à la gastronomie ;
- Lyon développe la thématique « nutrition et santé » au sein de l’ancien Grand Hôtel-Dieu, réhabilité et inauguré en 2019 ;
- Dijon, comme pôle de référence pour la culture de la vigne et du vin, ouvrira à la fin de l’année 2021;
- Paris Rungis, privilégiant la valorisation d’une alimentation durable et d’une gastronomie responsable, prévoit l’ouverture de son premier site pour 2024, en bordure du Marché d’intérêt national de Rungis.
Ce réseau est coordonné par la MFPCA, qui organise chaque semestre les « Rendez-vous du Réseau des Cités de la gastronomie », favorisant l’échange d’expertise et de bonnes pratiques et consolidant l’élaboration des programmes culturels, pédagogiques et scientifiques de chaque site. Ce réseau culturel pluridisciplinaire a pour objectif de sensibiliser le public à l’histoire, aux fonctions et valeurs de l’élément, ainsi qu’à la vitalité de ses expérimentations en France et dans le monde. À l’échelle nationale, les activités de la MFPCA dans la valorisation du repas gastronomique des Français sont relayées par le Club de la Table française, organisatrice du « Grand Dîner » célébrant le 10e anniversaire de l’inscription (février 2020), par l’agence Atout France et par l’IEHCA. Sous leur impulsion cumulée, les études et les publications, retraçant l’histoire de ce patrimoine d’exception et les savoir-faire spécifiques des agriculteurs, des vignerons, des cuisiniers, professionnels ou amateurs, se sont multipliées depuis la reconnaissance de l’élément.
À l’initiative du ministère chargé de l’économie, la première « Fête de la Gastronomie », rendez-vous populaire annuel des professionnels, a été créée les 20 et 21 septembre 2011, comme l’une des mesures de sauvegarde du dossier d’inscription. Consacré aux acteurs et aux savoir-faire de la gastronomie, cet événement annuel propose durant trois jours des dégustations, banquets, pique-niques et ateliers dans un esprit de convivialité, de pédagogie, de partage et de fête. À l’initiative du ministère chargé des affaires étrangères, la première édition de « Good France / Goût de France », lancée le 21 mars 2015, célèbre chaque année la vitalité de la gastronomie française dans le monde entier, grâce au réseau des postes diplomatiques, qui mobilisent plus de 3 000 restaurants dans 150 pays. À l’invitation de ces postes, des universités étrangères, des agences internationales (Organisation des Nations unies pour l’éducation, la science et la culture, Organisation mondiale du tourisme, Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture, …) ou des Gouvernements, la MFPCA, par la voix de son président, Jean-Robert Pitte, a exposé les principes de la reconnaissance culturelle et patrimoniale du repas gastronomique des Français sur la scène internationale. Ses échanges réguliers avec le Japon ont accompagné les réflexions qui permirent l’inscription par l’UNESCO en 2013 du Washoku (traditions culinaires des Japonais). Depuis 2019, la « Fête de la Gastronomie », avancée au mois de mars et étendue à une semaine, a été réunie avec ce programme « Goût de France », mobilisant plus fortement au sein de son comité de pilotage, en plus des professionnels du secteur, les services concernés des ministères chargés des affaires étrangères, de l’agriculture, de la culture, de l’économie et de l’éducation nationale. Par ailleurs, le ministère chargé de la culture, à travers ses services et opérateurs, a soutenu la singularité de la gastronomie à la française, dans ses conséquences pour le tourisme culturel (par exemple, place des terroirs dans la convention-cadre relative au tourisme culturel signée lors du Comité interministériel du Tourisme du 19 janvier 2018 ; organisation de l’exposition « Les Enfants à table ! Quand l’art s’invite dans nos assiettes » de la Fondation Nestlé France, lors des Journées européennes du patrimoine 2019).
À l’échelle nationale, la reconnaissance du repas gastronomique comme Patrimoine culturel immatériel de l’humanité a aussi stimulé les travaux d’inventaire des savoir-faire et des pratiques agricoles, alimentaires, culinaires et gastronomiques, qui, d’année en année, sont plus nombreuses à rejoindre l’Inventaire national du patrimoine culturel immatériel, tenu par la direction générale des patrimoines et ouvrant droit à l’attribution, à leurs détenteurs, de l’emblème « Patrimoine culturel immatériel en France ».
Enfin, les activités de valorisation passent aussi par la formation, en France, de chefs étrangers, qui transmettent, dans leur pays d’origine, les savoirs et savoir-faire ainsi acquis. Dix ans après l’inscription du repas gastronomique des Français au Patrimoine culturel immatériel de l’Humanité, une évaluation positive peut donc être faite du rayonnement de la cuisine française, en France comme à l’international, grâce à cette démarche menée alors et accompagnée sans interruption depuis, avec la coordination de la MFPCA. C’est d’ailleurs le sens que la direction générale des patrimoines donnera au « Rapport périodique » qu’elle devra constituer prochainement sur l’élément, afin de le transmettre réglementairement à l’UNESCO avant le 15 décembre 2021.